À l’aube de l’ouverture de la 15e session de l’Assemblée des États parties au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (AÉP), la Procureure la Cour pénale internationale (CPI), Fatou Bensouda, a annoncé publiquement que l’examen préliminaire de son Bureau concernant la situation en Afghanistan pourrait déboucher de façon imminente sur l’ouverture d’une enquête relative aux allégations de crimes contre l’humanité et crimes de guerres qui auraient été commis par les Talibans, les services de sécurité afghans et le personnel des forces armées américaines dans le cadre du conflit armé opposant les forces progouvernementales et antigouvernementales.
Quelques jours plus tard, le Bureau du Procureur a publié le Rapport sur les enquêtes menées en 2016 en matière d’examen préliminaire (« Rapport 2016 ») dans lequel la Procureure Bensouda réitère que toutes les conditions requises pour ouvrir une enquête sont présentes et indique que « le Bureau [étant arrivé] au terme de son évaluation des facteurs énoncés aux alinéas a à c de l’article 53-1 du Statut, [il] s’apprête à décider, de façon imminente, de demander ou non à la Chambre préliminaire l’autorisation d’ouvrir une enquête sur la situation en République islamique d’Afghanistan à compter du 1er mai 2003 ».
Le premier Procureur de la CPI, Louis Moreno Ocampo, avait annoncé publiquement en 2007 l’ouverture d’un examen préliminaire en Afghanistan, qui a ratifié le Statut de Rome le 10 février 2003, donnant ainsi à la CPI une compétence sur les faits commis sur le territoire afghan ou par des ressortissants de ce pays à compter de 2003 pouvant constituer des crimes au sens de ce traité international.
Elle s’insérait alors dans le contexte du conflit en Afghanistan, amorcé dans la foulée des attaques terroristes du 11 septembre 2001, aux États-Unis. À la suite à ces attaques, une coalition de pays dirigée par les États-Unis a procédé à des frappes aériennes et à de multiples opérations terrestres en Afghanistan afin de déloger les Talibans, associés au réseau d’Al Qaeda. Ces opérations ont permis d’évincer les Talibans du pouvoir et de former un gouvernement provisoire en décembre 2001 sous les auspices de l’ONU, avant d’être remplacé en 2002 par un nouveau gouvernement afghan de transition. Les affrontements se sont néanmoins poursuivis et les Talibans et autres groupes armés opposés aux forces gouvernementales ainsi qu’à leurs alliés occidentaux ont regagné du terrain dans le sud et l’est du pays. Le conflit armé s’est par la suite intensifié et s’est étendu au nord et à l’ouest, alors qu’ont persisté de violents combats qui, entre 2007 et juin 2015, ont causé la mort de plus de 23 000 civils conformément aux chiffres révélés par la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA)[1].